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La main-d’œuvre forestière : une richesse collective trop souvent oubliée

Dans cette époque où les changements climatiques ne sont plus un mythe, mais bel et bien une problématique à laquelle nous devons faire face, les vastes forêts du Québec sont désormais vues comme une des solutions pour diminuer nos émissions de gaz à effet de serre (GES). Nous reconnaissons d’emblée la contribution des forêts en croissance dans la captation de CO2 et les bénéfices d’utiliser le bois comme matériel écologique de substitution au ciment, à l’acier et aux plastiques dont la fabrication implique de grandes émissions de GES. Cependant, plusieurs personnes, dont nos élus au gouvernement, ont tendance à oublier un intrant extrêmement important, soit la main-d’œuvre forestière, sans qui l’utilisation accrue du bois serait impossible. Permettez-moi donc de leur rappeler l’importance de la situation.   

Dans son discours lors du lancement de la Stratégie nationale de production de bois, le ministre des Forêts, de la Faune et des Parcs, Pierre Dufour, affirmait : « la foresterie québécoise est devant un défi de taille : arriver à exploiter son plein potentiel et jouer son rôle de premier plan dans la lutte contre les changements climatiques. Aujourd'hui, avec le dépôt de la Stratégie nationale de production de bois et de la Politique d'intégration du bois dans la construction, nous mettons en place les conditions gagnantes pour un aménagement durable et profitable de nos forêts pour les générations actuelles et futures. »

Dans l’analyse des conditions gagnantes, je me demande si le ministère a réellement compris l’importance de son rôle dans l’attraction et la rétention de la main-d’œuvre forestière. Comme 92 % de la forêt du Québec appartient à l’État, que le ministère est en charge de la planification, que le gouvernement octroie les garanties d’approvisionnement et les contrats sylvicoles et qu’il est responsable des appels d’offres en récolte et en sylviculture, il me semble que son rôle est des plus évidents. Cependant, le ministère semble penser que ce n’est que la responsabilité des entreprises. Pourtant, peu de secteurs sont aussi dépendants du gouvernement que le secteur forestier.

La situation est critique. En effet, tous les secteurs de l’économie sont inquiets face à l’actuelle pénurie de main-d’œuvre. Les entreprises multiplient les initiatives pour attirer des travailleurs et maintenir ceux qu’ils ont en emploi. La concurrence est féroce et l’offre doit être attrayante. Le secteur forestier fait valoir notamment le travail en plein air, la liberté et l’autonomie. Notre principale ennemie est l’insécurité et c’est là-dessus que le gouvernement a le plus grand rôle à jouer.

À maintes reprises, nous avons répété aux représentants du ministère des Forêts, de la Faune et des Parcs (MFFP) que le gouvernement doit faire preuve d’une extrême prudence avec ses politiques publiques en faisant passer toutes ses décisions dans le filtre de la main-d’œuvre pour s’assurer qu’elles n’aient pas d’impacts négatifs. Dans un système où les employés acceptent déjà beaucoup plus de compromis que dans les autres secteurs, dont le travail au rendement, la saisonnalité et la vie en campement, la main-d’œuvre doit constituer sa principale préoccupation. Comment faire comprendre au gouvernement que toute insécurité supplémentaire ajoutée dans ce système à l’équilibre précaire est un pas de recul pour l’atteinte des cibles qu’il s’est fixées en matière de lutte aux changements climatiques? Comment lui faire comprendre qu’en mettant en place le régime forestier en 2013, il s’ajoutait une responsabilité non prévue initialement, c’est-à-dire celle de tenir compte de la main-d’œuvre forestière dans ses décisions?
Nous avons encore la chance au Québec de pouvoir compter sur une main-d’œuvre forestière expérimentée et mobilisée qui cultive la forêt, approvisionne les usines de transformation, peuple nos régions avec ses familles et nous permet d’occuper le territoire. Il faut prendre conscience de cette richesse collective que nous avons et qui rend possible l’utilisation accrue du bois faisant partie intégrante de la stratégie gouvernementale pour lutter contre les changements climatiques. 

Je me fais un devoir de rappeler régulièrement cette responsabilité au gouvernement et je continuerai jusqu’à ce que le message soit bien compris. Les élections sont à nos portes. Je vous invite à faire de même. Allons sonder ce qu’en pensent les différents candidats et candidates!
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Février 2025

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